Alignement

Difficile alignement

Car l’échelle était bancale,

Besognant an après an,

Dure poussée verticale.

L’esprit était trop fécond,

S’éparpillant bien souvent,

Gîtant sur sable mouvant,

Une base sans fondement.

L’âme était à l’abandon,

Coeur noirci ou rubicond,

Sans couleurs au diapason,

Chaos de sombres palpitations.

Le corps allait reculons,

Sautillant bon après bond,

Un tempo chair puis pâle,

Celui d’une vie étale.

Un barreau est apparu,

Surprenant et incongru,

Il a fait feu de tout bois.

Ce qui tenait de guingois

Fut redressé sans effort.

L’échelle croyant encore

A la vie, s’est redressée,

Un juste équilibre est né.

Le corps, l’âme et puis l’esprit

Se sont enfin réunis,

Donnant son sens à la vie

Qui maintenant et ici

Devient source et puis jaillit.

Beau barreau de la jeunesse

Qui en soi ne meurt jamais,

Un nouvel état paraît,

Solide édifice final,

Un pied de nez magistral

Au bâton de la vieillesse.

Le chant

Eclairage nocturne
D’un songe en consistance,
Le bel oiseau blanc bleu
A grand ouvert ses ailes
Et dans le jour qui pointe
Il m’a emporté là.

En moi résonne une âme,
Indicible symbiose,
Composition fluide,
Douce complicité,

Et chantent trois perles d’or.

Effluve tentation

A la fois doux tourment
Et sensuelle torture,
Cruelle est la distance
Dont se moque la fragrance
D’un parfum reconnu
Sur la peau tendre et nue
D’un corps en abandon
Sous mes doigts si gourmands
Qui le sculptent en mémoire
Dans le calme du soir.

Tour à tour doux tourment
Et sensuelle torture,
Il affleure, souvenir,
Et désir à venir.

Son parfum est un pont
Entre deux temps présents
En moi si séparables
Et pourtant si semblables.
Son parfum est un pont,
La raison le dément
A mon coeur dévêtu
Par l’effluve venue.

Le cruelle distance,
Pour le nez, transparence,
N’est là que pour mes mains
Il est près mais trop loin.

Vif instant suspendu
Entre vêtu et nu
Selon le sens actif
De mon corps réactif.

Puis il est reparti.

Son parfum reste ici.

Effluve tentation d

Merci

Tu fus refuge et abri,
Mon infatigable ami,
Ma tanière indéfectible
Pour oser faire quelques pas
Dans ce monde difficile,
Tellement éloigné de moi.

Le temps accomplit son œuvre.
Les mains rudes de cette pieuvre
A grisé le doux nid blanc,
Un fatal désœuvrement
A repeint d’un grand trait noir,
Ton chemin, voici son soir.

Dévouement sans imprévu
D’un appui m’avait pourvu,

Dénouement bien que prévu
Me laisse nue et perdue.

Compagnon d’une décennie,
Pour tous les pas accomplis
Grâce à ton aide discrète,
Essentielle pour une tête
Qui par toi fut adoucie
Je dis simplement « Merci ».

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T3A

Le premier A était là,
Les os pointant sous la peau.
Insidieux il s’installa,
Ne laissant aucun repos.

Longtemps il fut maître et roi,
Dessous se cachait l’autre A.
Immergé, il éclata
Et un beau jour émergea.

Arriva un sigle et T,
Imprévu quotient testé
Pour un score à intégrer,
Un cadeau empoisonné.

De folie le dernier A
Mi-génie se retrouva.
Il quitta filtres et faux moi,
Ecrivit les choses à plat,
Délaissant le flou du ton,
Pelant le caméléon.

A+A+A+T
Equation d’identité.

Sans titre

 

L’asperge

Ainsi donc une asperge…

Ainsi donc dans l’état
D’un cri muet elle est là.

Fine et muette,
Toute en tête,
Aspergette
Est secrète.

Quel est donc ce mot-là?

Peu importe cela,

A la fois surprenant
Et autant évident.

C’est une asperge à peaux
Trop serrées qui donnent chaud,
Qui s’incrustent et épuisent
L’aspergette tout en crise.

Petit mot imprévu,
Le sésame est venu,
Apportant les travaux
De remise à niveau
De ce qui affleurait
Mais surtout se cachait.

Je découpe en lambeaux
Ce qui cache le cadeau
Que la nature a mis
Dans le creux de mon lit,
S’il y eut un berceau
Il eut trop de barreaux,
Trop de méconnaissance
D’une mue en instance.

Je ne veux plus garder
Que l’habit ajusté.

Asperge caméléon,
Je déserte le giron
Du pâle copier-coller
Dans l’étrange société
Où tout est de guingois
Pour un être comme moi.

Une fois les peaux tombées,
L’aspergette va pousser.
Une fois les peaux tombées,
L’asperge va respirer.

Ainsi donc une asperge…

dim

Pépite

 

Les mots tus ne deviennent pas maudits,
Ou conte à rêver debout.

En maîtresse du jeu,
La vie choisit une pépite,
La seule qui survivra,

Nichée au fond de soi,

Dans un repli ténu
Que l’on ressent à peine.

Souvent on la perçoit
Mais l’éclat ne dure pas,
Mise en pleine lumière
Elle n’existerait pas.

Pépite, tendre pépite,

Couleur de givre,
A peine un poids,
Elle tient chaud
Et donne froid.

Parfois elle brûle,
Hurlant en soi.

Elle se fait oublier
Dans la course des jours,
L’instant d’une autre chose
Ou le temps de la vie,
Le regard vers dehors,
En dedans elle est là.

Elle veille,
Afin de ne pas mourir,
Lueur interne et fictive à la fois,

Cachée au fond d’un creux de soi.

Un inextricable tissage,

Trame de rêve et de réalité,
Les fils ténus des souvenirs passés
Croisant les fils ténus des fantasmes créés,
Forme un léger voile enrobant la pépite,

Lui donne consistance
Comme un aveu d’absence,
Et subtile présence
Sans le poids d’une sentence.

Une trame faite de rêve et de réalité
Devient le lit secret de l’ infime pépite,

Le cœur est trop fragile
Pour en subir l’éclat,
Le corps trop délicat
Pour n’être que mépris.

Une trame faite de rêves et de réalité
Permet à la pépite de ne pas m’étouffer.

Un jour elle naquit,
Et en moi s’installa.

La glace vira au rouge
Qui lui-même devint froid,
La griffure éclata
Et en bulles s’irisa,
Ces portes dérobées,
Permirent un autre moi.

La vie, maitresse du jeu,
Ne laissa qu’une pépite,
Et de ses folles teintes
Elle m’éclaboussa,

Les mots qu’on dit
Racontent ceux à taire.

L’indicible d’une pépite.

Pascale Debelloir-Forgerit

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